Les mots surlignés font l'objet d'une note
1Monseigneur, au retour de monsieur le president de Portes, il me bailla deux lettres de
2madame la grand quelle mescript pour ces affaires, lesqueles je vous envoye
3par mon laquaix. Je pence que vous an aurés receu une quest à vous ; et
4pour monstrer le bon office que messieurs les gens du roy, tant de la chambre
5que de la court, ont faict sur les lettres de don, je vous envoye une coppie
6des conclusions prinses tant dune partie que daultres sur lesqueles
7neantmoingz je ne mareste pas beaucop, car il se trouvera par
8la lecture desdites lettres que le roy a derogé à toutes ces ordonances
9et aux derrogations des derrogations et ne lerra pour tant de
10representer aultre règle demain, non obstant les conclusions de
11ces messieurs pensans y avoir esgard de passer oultre ; et sil
12vous plaisoict parce laquaix en escripre en particullier ou
13en general à la court, ce seroict bien maintenant le coup car il
14sen fera ung arrest, soyt de la veriffication ou renvoy,
15et scay bien quil feroit plus destat de voz lettres que de celles
16du roy ne du duc de Scavoye. Je cognoy bien ceulx qui sont
17de bonne volunté et les aultres qui ne le sont et les rancoeurs pourquoy.
18Or monseigneur, javoye remis à la première commodité vous escripre
19que après le grand contentement que les dames ont heu de remettre
20le bal, elles nont pas heu grand joye à la reformation des
21habitz, mesmes de ceulx de coleur que pour la dernière foys
22quelles pencent les porter, ilz ne tièrent bien les rues. Avant-hier,
23à la procession, il y avoict pour le moingz dix huict ou vingt
24robes de velours avec panssementz dor et dargent, y comptant cele
25de madamoiselle du Motet de velours violet cramoisi, toute couverte
26le corps de grantz et larges passementz dargent avec des grosses
27[96 v°] eguillietes dor sur les menches et au devant de la robe accompagnée
28de la cotte de satin cramoysi à fondz dor rayé dargent. Elle
29gaignoyt de tabernacle ; puys à laprès souppé au bal chez
30monsieur du Monestier, elle avoyt changé daultre habit
31au si beau et aussi riche : un manteau de panc cramoysi
32mesme, un corps de satin rayé dor faict à lespaignolle.
34Or y avoyt il partaige de bal partaige du je[u] des
35dames, partie chez monsieur le gouverneur et partie chez
36monsieur du Monestier, où il y eust masques à force.
37Tout ce soir, monsieur du Molar tint le bal comme jà
38le dimanche au paradvant. Il avoyt faict tant à laprès
39disnée qu’à laprès souppés, remectant ses affaires à la
40volunté de messieurs. Et, à ce que jay peu entendre, il ne
41continue le bal que par oppignon quil a destre amoureulx
42cadance. Lon a descouvert ces jours passés des amours
44que lon a veu esclorre par ce quelles avoyent jà long temps
45conue de quoy monsieur de Bazemont nen sera pas trop ayse
46si jà il nen prins asseurance de la damoyselle
47sa maistresse parce quil y a ung consellier de la court qui est
48logé où estoyt monsieur de Marcieu et la damoyselle
49vis-àvis chez le secretaire Rossignol, nayant que la
50rue entredeulx, où il peult plus commodement faire entendre
51ces passions. Elle est belle vefve, honeste, de bon lieu
52et de bonne part, et aymable et daussi belle taillie que damoiselle
53[97] de ceste ville. Jen ay jà faict la guerre audit sieur de Bazemont, mays
54il se promet quelque asseurance. Elle a jà heu deux
55marys, mays je croy que lung ne laultre nont trouvé le secret
56de la noce. Le plus grand inconvenient qui puisse advenir
57est que tous les vins vieulx de ceste ville sont cy caichés quon
58nen peult plus trouver ; et le malheur est que je ne me puys
59acomoder aulx noveaux, car mon naturel est de ne mabiller
60de vert. Sil vous plaisoyt menvoyer une commission
61pour en faire recherche, il sen trouveroyt encor assés comp[l]etement
62pour votre venue aux estatz, tant blanc que clairet et ce
63en vous actendant je macomoderoys aultrement vous serés
64fort mal abreuvé. Pencés y : ung adverti en vault deulx.
65Ce sont affaires domestiques et proffitables à la santé
66de laquelle vous debvés estre curieulx, sy tant est
67je feroy si bien mon debvoyr que naurés occasion destre
68faché contre moy, y deussé-je appeler votre aulmonier
69qui nest pas maintenant guière empesché. Et actendant
70de recepvoyr voz commandementz, je supplieray le Createur
71vous donner
72monseigneur, en parfaicte santé, heureuce vie et longue. De Grenoble,
73ce IIIIe jour de febvrier 1574
74Avoyr veu les lettres de madame la grand, je vous supplie les me renvoyer
75pour luy faire responce ; et sil vous plaict luy escripre, jaymerey luy
76faire tenir leuremède [sic] par la voye du chevaucheur de Montmelian.
77Monsieur le president a jà faict puys son arrivée quatre ou cinq entrées pour apointer
78monsieur Bovier et sa feme, mais ilz ne pencent venir au poinct car il se veult
79reserver le droict de retention comme monsieur Lhemery demandoit quon remetoit
80le tout à votre venue.
81Votre très humble serviteur
82Duvant